SNA contre SSN
La rupture récente du méga contrat de sous-marins avec nos amis australiens a donné du grain à moudre à certains adeptes d’un sport, que pratiquent nos adversaires industriels et beaucoup de nos compatriotes, le French bashing.
Le choix australien, principalement politique, peut se comprendre, même si leur façon de faire laisse vraiment à désirer. Mais l’argument selon lequel l’offre initiale franco-américaine (et oui la traîtrise venait des 2 côtés de la table) était dépassée, est ridicule.
La France, sous l'impulsion gaullienne d'indépendance stratégique, avec un peu d’aide de ses alliés, va se lancer dès les années 50 dans un programme gigantesque. En une génération, il va permettre à la France de revenir au top niveau technologique et industriel et de retrouver une place équivalente à la Grande-Bretagne d'un point de vue militaire. Le SNA Suffren qui rentre tout juste en service dans la marine nationale en est le symbole le plus récent.
Le SNA français de type Barracuda aurait-il eu une chance contre un dérivé du SSN Virginia Américain dans le cadre d’un appel d’offre non biaisé?
Les sous-marins peuvent être considérés aujourd'hui comme les systèmes d’armes les plus complexes, les plus coûteux et finalement les moins connus du grand public.
Mais comment comparer des navires lorsque la plupart des données clés ne sont pas accessibles?
Toutes les grandes puissances ont développé leur savoir-faire selon leurs moyens et leurs priorités stratégiques. Il est indispensable de revoir l’histoire de ces programmes de ces 70 dernières années afin d’avoir des éléments de comparaison.
Dès 1954, les sous-marins nucléaires de premières générations vont démontrer leur énorme potentiel offensif contre les navires de surface. Cette révolution change les règles de la guerre de course.
US Navy
Hyman Rickover rejoint le programme de sous-marin nucléaire de l'US Navy en 1946. Ses méthodes peu orthodoxes de recrutement et de management qu'il va imposer pendant quarante années, vont permettre à l'US Navy de se doter d’une force sous-marine sans équivalent dès les années 70.
Entre 1955 et 1957, le premier SSN Le Nautilus coule, de manière simulée et sans être inquiété, les escorteurs et les porte-avions qu’il engage. En retour, il subit plus de 5000 attaques des escorteurs qui ne parviennent à le détruire fictivement que 3 fois!
L’estimation de sa survivabilité, 100 fois supérieure aux sous-marins classiques, va pousser l’US Navy à stopper tout projet de sous-marin classique définitivement.
Ces derniers sont incapables d’engager un SNA; les torpilles de l'époque étaient bien trop lentes. Cependant, il reste de nombreux défauts à corriger pour que ces bateaux soient également efficaces contre l'énorme flotte sous-marine soviétique.
Le programme Sturgeon de deuxième génération représente un saut qualitatif et quantitatif énorme, produit à raison de 4 exemplaires par an, pendant 9 ans. Il s'agit du premier vrai sous-marin chasseur multirôle. De nouveaux équipements apparaissent; sonar remorqué permettant une détection à des distances beaucoup plus importantes, torpilles à grande vitesse filoguidées efficaces contre tout type de cible, missile anti sous-marins SUBROC conçus pour être tiré près de la surface pour sortir de l’eau et voler comme un missile pour se rapprocher rapidement et larguer une charge nucléaire sur une cible qui n’avait aucune chance de s'échapper. Cette arme imparable a probablement été conçue pour couler à coup sûr un SNLE soviétique surpris en train de tirer ses armes de fin du monde…
L'arrivée en 1972 du fameux SSN 688 Los Angeles de troisième génération va permettre à l'US Navy de maintenir son avance jusqu'à la fin de la guerre froide. Il va être produit à 62 exemplaires, une quantité inégalée pour une classe de sous-marins qui en 2022 représente encore plus de la moitié des sous-marins de l’US Navy.
Très silencieux, rapide et armé de plus de 35 torpilles/ missiles, il dispose sur les derniers modèles de 12 tubes verticaux pour missiles de croisières.
Il est raisonnable de penser que pendant les années 80, 3 ou 4 Los Angeles patrouillaient en permanence en Mer du Nord, avec souvent l’aide de sous-marins de la Royal Navy et de notre Marine, prêts à empêcher tout déploiement de navires soviétiques. Plus de 150 torpilles et plusieurs dizaines de missiles antinavires prêts à l'emploi; de quoi donner de sacrés cauchemars à tous les marins soviétiques en mission
La flotte du drapeau rouge
Dans les années 50, la suprématie navale de l’Otan était incontestable. Les dirigeants soviétiques ont donc choisi d’investir dans une force de sous-marins nucléaires, qui avec l’aviation navale à long rayon d’action avait pour objectif de couler les convois de ravitaillements en cas de conflit en Europe.
La première génération de sous-marins soviétiques développée à la hâte ne fut pas un grand succès accumulant de nombreux défauts de fabrication (fuites de réacteurs...), et manque d’attention à la sécurité des équipages. De plus, la formation plus rudimentaire des marins soviétiques, n'était plus adaptée à des machines de haute technologie. Ces sous-marins étaient en fait plus dangereux pour leur équipage que pour l'ennemi.
Comment reconnaît-on un marin soviétique de la flotte du Nord? Il brille dans le noir…
Ces sous-marins étaient si peu fiables qu’ils n’ont même pas été engagés pendant la crise de Cuba.
Le commandant d’un des 4 sous-marins diesel de type Foxtrot qui a eu à affronter l'US Navy pendant cette crise s'est vu reprocher par Kroutchev lui-même, d’avoir fait surface. Kroutchev pensait que les sous-marins engagés étaient nucléaires...
Il faut savoir que cette mission a failli mal finir; un officier du sous-marin, probablement épuisé, voulait tirer une torpille à tête nucléaire sur la frégate qui les harcelait depuis des jours. La 3eme guerre mondiale s’est joué à peu de chose...
La deuxième génération, bien que toujours beaucoup plus bruyante que ses adversaires, a fait apparaître de nombreuses innovations; réacteurs compacts très puissants permettant à des sous-marins à coque en titane de dépasser les 40 kts, de plonger à plus de 1000 mètres leur conférant une certaine invulnérabilité. Les premiers sous-marins lance missiles de croisières sont également apparus à cette époque, une vraie révolution dans la guerre de course.
La troisième génération déployée dès le début des années 80 voit enfin des sous-marins de niveau technologique comparable à leurs adversaires; les Japonais ayant vendu des outils numériques permettant aux soviétiques de fabriquer des hélices enfin silencieuses. Les commandants soviétiques avaient enfin les moyens de faire jeu égal grâce à leurs nouveaux Sierra, Akula et Victor III. Cette génération était équipée de nouvelles armes redoutables; missiles comparables au SUBROC larguant soit des charges nucléaires soit des torpilles classiques, mais aussi de l'énorme torpille anti porte avion de 650 mm à remontée de sillage. L’arme la plus originale est sans conteste la torpille Chkval, qui atteint des vitesses de plus de 200 kts sous l'eau en créant une bulle de gaz devant son nez.
Certaines sources parlent aussi d’un système de défense tirant des petites torpilles de 324 mm pour intercepter les torpilles ennemies.
Toujours à la recherche de systèmes novateurs pour compenser leur infériorité, les soviétiques ont également mis en service des systèmes de détection non acoustique, SOKS dès les années 70. Cet ensemble de capteurs repère le sillage d’un sous-marin, en détectant diverses traces présentes dans l’eau (chaleur radioactive, hydrogène, traces de peinture, etc). Un Victor ainsi équipé a réussi à pister un SNLE américain dans les années 80, un exploit que les Américains ont longtemps pensé impossible vu leur discrétion. Ces systèmes sont présents sur les derniers Akula et Yassen.
La discrétion, caractéristique inhabituelle pour des productions russes, en a surpris plus d’un, comme ce commandant américain du SNA Bâton Rouge qui en 1992 perdant la trace d’un Sierra qu'il pistait, a fini par se faire surprendre par ce dernier lorsque le sous-marin russe l’a percuté avec son kiosque en titane en faisant surface. La coque beaucoup plus fragile du sous-marin américain ne l'a pas suffisamment protégé pour empêcher des dommages structurels graves. Celui-ci est rentré au port et n’a jamais été réparé. Le sous-marin russe porte depuis, fièrement sur l’avant de son massif, cette marque de victoire. De là à penser que la collision était intentionnelle…
Les Soviétiques ont également inventé une nouvelle classe de navires, le croiseur sous-marin de la classe Oscar. Ces monstres de 20 000 tonnes produits à plus de 10 exemplaires, embarquent, en plus de leurs 28 torpilles, 24 missiles P 700 Granit de 7 tonnes, les tueurs de porte-avions.
A la même période, notre premier SNA Rubis de 2600 tonnes et ses 14 torpilles / missiles rentrait en service.
A la fin de la guerre froide, les Russes auront construit 376 sous-marins nucléaires en brisant à peu près tous les records possibles : taille, puissance de feu (Oscar, Typhoon), vitesse (Alfa, Mike), immersion maximale grâce aux coques en Titane (Alfa, Mike et Sierra) et malheureusement également le nombre d’accidents, près de 20 sous-marins ont été perdus.
Britannia, maîtresse des profondeurs
La Royal Navy ne domine plus les mers depuis la seconde guerre mondiale, mais sa relation de partenaire privilégiée avec les US va lui permettre de maintenir son rang et son expertise dans la guerre navale pendant toute la guerre froide.
L’accord négocié en 1955 par Lord Mountbatten (l'ancêtre de l’Aukus) permet à la Royal Navy d'économiser de nombreuses années de recherche en greffant la partie propulsion d’un SNA américain à un avant Made in Britain pour obtenir ses premiers SNA.
Entre 1960 et 1970, la RN va mettre en service une douzaine de sous-marins nucléaires d’attaque extrêmement discrets grâce à des solutions développées localement très novatrices.
Le Swiftsure de deuxième génération fut équipé dès son lancement en 1971 d’une hélice carénée (Pumpjet) permettant de réduire énormément les bruits d'hélices. Cette technologie est si efficace qu'elle est devenue un standard sur les sous-marins français et américains à partir des années 90 soit 20 ans plus tard.
Une mission du Swiftsure dans la deuxième partie des années 70 permet de se faire une bonne idée du niveau du Submarine Service de sa Gracieuse Majesté.
Lors d’une patrouille très au nord, le Swiftsure détecte la signature sonore du nouveau porte aéronef soviétique, le Kiev. La mission d’un sous-marin en temps de paix est de cataloguer la signature sonore de tous les navires, amis et ennemis. Pour cela, il faut se rapprocher le plus possible afin de l'écouter parfois pendant des jours et d'enregistrer tous ses bruits émis.
L'objectif étant par la suite de partager l'enregistrement sonore avec tous les autres sous-marins pour faciliter sa détection et donc sa destruction en temps de guerre.
Pour un commandant de sous-marin, être le premier à compléter le fichier de signature sonore d'un navire aussi important est une vraie consécration professionnelle
Il faut bien comprendre que le Kiev est un navire à vocation principalement anti sous-marine, lourdement armé, doté de nombreux moyens de détections, d'hélicoptères et soutenu par de nombreux navires d’escortes. Le commandant anglais, conscient que même en temps de paix, un sous-marin de OTAN repéré dans les eaux soviétiques serait très probablement la cible de tir réel, va faire honneur à la devise de son arme “We come unseen”.
Il décide de cacher son bateau à 3 mètres sous la quille du Kiev. Le Swiftsure et son équipage vont y rester pendant plusieurs heures pour filmer la coque et les hélices avec son périscope. Il faut tout de même visualiser l'exploit; se cacher sous un navire de 40 000 tonnes avec un sous-marin! Le célèbre polaroïd du Mig 28 en vol inversé de Maverick et Goose dans Top Gun fait pâle figure!
Ce fait d’arme révélé par la BBC en 2013, permet de se faire une bonne idée de la qualité du matériel et du niveau d'entraînement des marins anglais. Les sous-marins ont aussi permis à la Royal Navy de ne pas être inquiétée très longtemps par la flotte argentine qui n’avait pas de moyen moderne pour les chasser.
Les commandants britanniques sont tous sélectionnés lors du fameux “Perisher course”; exercices très réalistes pendant lesquels les candidats sont poussés au-delà de leurs limites.
Les années 80 vont voir l'arrivée de la classe Trafalgar introduisant d'autres nouveautés la rendant toujours plus efficace; tuiles anéchoïdes pour être encore plus discret, et surtout la nouvelle torpille Spearfish, capable de filer à plus de 60-80 kts.
La Royal Navy dispose à cette époque d’une quinzaine de SNA modernes qui ont grandement contribué à tenir la Flotte Rouge en respect. Mais les Britanniques, en sacrifiant leur industrie de défense, deviennent de plus en plus dépendants de leurs cousins américains.
Marine Nationale priorité à la dissuasion !
Le premier sous-marin nucléaire français a failli être un sous-marin d’attaque. Le projet est mis en sommeil; la France à cette époque n'étant pas capable de produire des réacteurs suffisamment compacts.
Malgré des relations tendues avec les Américains, ceux-ci vont tout de même fournir à la France suffisamment d’uranium enrichi pour alimenter les réacteurs d’une première génération de sous-marins lanceur d’engin du type Redoutable, clef de voûte de la dissuasion nucléaire française des années 70 et 80.
Le programme d’un SNA nucléaire est relancé en 1972 avec un premier exemplaire mis en service en 1983. L'expérience accumulée avec le programme Le Redoutable, permet le développement d’un réacteur nucléaire extrêmement compact, qui pour des raisons de coût est implanté dans une coque dérivée du dernier sous-marin classique français L’Agosta.
La France réussit le tour de force de développer un sous-marin nucléaire de moins de 3000 tonnes, ce qu'aucun de nos alliés ne nous pensait capable de réussir.
Cependant, il fallut attendre le début des années 90, pour que ces bateaux arrivent à maturité.
Une fois la coque des Rubis redessinée et les dernières technologies intégrées, la marine disposait enfin d’un système d’arme performant et enfin silencieux. Ils sont désormais capables de se mesurer aux meilleurs sous-marins étrangers. Il est important de noter que la France mettait aussi en service dans les années 90 une nouvelle génération de SNLE considérés à l'époque comme les sous-marins les plus silencieux du monde.
Lors d’une patrouille en 2009, un sous-marin de ce type a percuté un SNLE britannique, aucun des deux navires n’ayant été capable de détecter son confrère avant l’impact. S'ils sont tous deux rentrés au port sain et sauf, cet incident confirme que cette génération de sous-marin est extrêmement difficile à détecter assurant ainsi sa quasi invulnérabilité.
Les SNA de la classe Rubis sont encore très actifs; en février 2022, 4 exemplaires sont en mer, 2 en protection du GAN en Méditerranée et 2 en Atlantique. Tous sont occupés à pister des navires désormais russes qui recommencent à faire des ronds dans l’eau de manière très peu amicale.
Mêmes anciens, les Rubis sont toujours équipés des dernières technologies dans les domaines des détecteurs, armements et discrétion acoustique.
Le Suffren, premier SNA du programme Barracuda est la dernière évolution du savoir-faire français. Deux fois plus gros que le Rubis, il intègre tous les progrès réalisés depuis 30 ans.
Comment comparer cette dernière production française avec le SSN Virginia déjà produit à 21 exemplaires sur les 66 envisagés? Comment se comparer avec un pays qui dépense 18 fois plus dans son budget de défense, et qui a produit 6 fois plus de sous-marins nucléaires que nos chantiers? Maîtrisons-nous les savoir-faire indispensables pour rendre ce matériel utile en cas de conflit?
Sans rentrer dans des guerres de chiffres qui sont invérifiables, il est plus utile de rappeler quelques événements de ces 40 dernières années qui illustrent bien la qualité de notre matériel et des marins qui les utilisent.
1971
Un sous-marin de construction française de type Daphné, le PNS Hangor de la marine pakistanaise, va couler une frégate indienne à l'aide d’une torpille acoustique. Cela reste à ce jour le seul sous-marin ayant coulé une cible, en temps de guerre, avec une torpille guidee (le HMS Conqueror aux Malouines a tué sa cible avec 2 torpilles non guidées). La marine pakistanaise utilise encore aujourd'hui des sous-marins français de type Agosta 90, ainsi que la marine indienne avec des Scorpènes, sous-marin classique très performant. Le “combat proven” reste le meilleur argument de vente.
1981
Lors d’un exercice, une frégate française, la Georges Leygues, équipée d’un nouveau système sonar à immersion variable, détecte un sous-marin russe de type Victor qui se croit à l'abri de toute détection sous une couche d’eau plus froide. La poursuite dure 19h, durant laquelle le sous-marin russe tente de s'échapper à très grande vitesse, mais la frégate et son hélicoptère finissent pas le forcer à faire surface juste devant la flotte de l’Otan qu’il pistait. Bonne démonstration de savoir-faire.
1996
Une révolution commence. La France met en service sur 3 frégates de type De Grasse le premier sonar actif très basse fréquence, le SLASM, qui donne aux frégates ASM des distances de détection alors inconnue. Le chasseur devient le chassé. Les marins racontent avec fierté les exercices interalliés où ce nouveau système déroute les sous-marins américains qui sont repérés à grande distance par ce nouveau chant du loup.
Le CAPTAS de Thales, descendant direct de ce système, équipe aujourd'hui la plupart des bâtiments ASM européens; même les Américains s’y intéressent.
Ces dernières années, trois frégates FREMM françaises équipées du CAPTAS ont été mises à l'honneur pour leur efficacité lors d'exercice ASM avec la flotte américaine.
1999 Kosovo
L’Amiral Coldefy raconte dans ses mémoires comment, lors de ce conflit, la marine française a démontré à ses alliés britanniques et américains devant les bouches de Kotor, que nous maîtrisons parfaitement l‘utilisation d’une force de sous-marins.
1998 et 2015
Deux SNA français, le Casabianca et le Saphir, se sont illustrés à presque 20 ans d’intervalles en coulant virtuellement à chaque fois le porte-avions US et son escorte lors d’exercices.
2016
Record battu: nos SNA ont passé la barre des 1000 jours en mer en une année!!
Janvier 2022, 50 ans de patrouille de dissuasion
Depuis 1972, un à deux sous-marins nucléaire lanceur d’engin sont en permanence à la mer, prêt à vitrifier les infrastructures de nos ennemis, sur ordre du Président de la République.
Cette compilation est loin d'être exhaustive, mais elle est un bon extrait de l'expérience de notre marine avec des navires pas toujours très jeunes mais en général bien équipés.
Il est à noter qu’en ce mois de février 2022, période où des confrontations ne sont plus à exclure, en plus des 4 SNA Rubis en opération, 3 de nos SNLE ont été envoyés en mer simultanément.
De plus, la marine française a à sa disposition le groupe aéronaval le plus puissant et le plus moderne que la France ait jamais possédé, et ce dans tous les domaines de lutte.
SNA français contre SSN américain
Les sous-marins, contrairement aux avions de chasse, font assez peu de show aérien ou de défilé, leurs performances réelles restent souvent inconnues même de nombreuses années après la mise à la casse de ces merveilles de technologie. Ce qui rend impossible un comparatif basé sur des chiffres, souvent délibérément imprécis.
Le SNA français est 2 fois plus petit, ce qui limite forcement le nombre d’armes et d'équipement emportés mais il embarque tout ce dont il a besoin pour se comparer au matériel US le plus récent:
Sonar de coque et de flanc (2 fois plus gros que sur le Rubis)
Contres mesures anti-torpille
Complément d’armement respectable ( 24 soit 10 de plus que le Rubis)
Isolation acoustique, matériel sur plot élastique
Hangar amovible derrière le massif pour l’emport de commando + mini sous marins
Vitesse silencieuse 2 fois supérieure au Rubis
Mise en œuvre du missile de croisière MdCN (une nouveauté pour un sous-marin français)
Il n’y a vraiment qu’un seul domaine où le SSN Virginia est largement supérieur, la puissance de feu. Beaucoup plus importante que pour le projet que la France proposait à l'Australie; une offre française à propulsion nucléaire n'y aurait rien changé.
Il est difficile de blâmer un commandant de sous-marin lorsqu'on lui offre de telles machines de guerre.
Le Virginia ajoute avec cet armement une mission supplémentaire de frappe stratégique sur le territoire chinois, ce qu'une offre française n’aurait pas permis avec une puissance de feu équivalente. C'est un message clair à ce pays ayant des velléités de domination dans la zone indo-pacifique.
Il n'est pas interdit de s’interroger sur la capacité d’une marine d’un pays de 26 millions d’habitants à absorber financièrement et humainement un programme de cette ampleur. La RAN opère aujourd'hui 6 sous-marins classiques dont l'équipage est de 50 marins. Les problèmes de recrutement sont mis en évidence par le fait que jamais plus de 4 sous-marins ont pu être armés simultanément faute de marins, et que sur les 4 commandants de sous marins identifiés sur le site web officiel, 3 sont originaires d’autre pays du Commonwealth (deux Canadiens et un Anglais).
Quant à elle, la France opère un système à deux équipages par sous-marin, Rouge et Bleu afin de maximiser le nombre de jours à la mer.
Mettre en œuvre 8 navires nucléaires de 10000 t suggère que les Australiens doivent recruter 5 fois plus de marins pour les armer et acquérir des compétences dans le nucléaire qu’ils n’ont pas aujourd'hui.
Le programme français était raisonnable, moderne et bien adapté aux besoins australiens d'évoluer d’une marine côtière à une marine de haute mer.
Si l’Australie choisit le Virginia Américain, ce qui est compréhensible étant donné les relations historiques entre les trois pays, cela reste un défi générationnel gigantesque que les Australiens ne pourront réussir, que si l'investissement humain et financier est à la hauteur. La peur de la Chine sera peut-être le catalyste nécessaire.
La France a produit moins de sous-marins nucléaires d'attaque que tous les autres pays cités précédemment, mais grâce à sa politique d'indépendance industrielle elle maîtrise, avec les Etats-Unis, la Russie et peut-être désormais la Chine, l’ensemble des technologies nécessaires pour concevoir un sous-marin de qualité.
Les succès à l’exportation de nos sous-marins classiques Agosta et Scorpène le démontrent régulièrement (27 exemplaires vendus). Nous avons un savoir-faire, il nous reste à le faire savoir de façon efficace.
Pas mal pour un petit pays de 70 millions d'habitants!